Décryptage

Développement d’aménagements cyclables en milieu peu denses

« Dans mon coin, à la campagne, il n’y aura jamais d’autres cyclistes que les sportifs du dimanche ! » Que répondre à ce constat pessimiste ? L’équipe de Vélocité est allée recueillir les bonnes pratiques de territoires peu denses, néanmoins pro-vélo.

Le vélo en milieu peu dense : l’exemple de la commune de Séné (56)

Com­ment une petite ville peut-elle favoris­er l’usage du vélo ? Enquête à Séné de Flo­ri­an Le Vil­lain, Vice-Prési­dent de Rayons d’Action à Rennes et admin­is­tra­teur de la FUB.

La com­mune de Séné (9 000 habi­tants) est située dans le départe­ment du Mor­bi­han (56) en Bre­tagne, à seule­ment 5 km du cen­tre-ville de Vannes. Le nom de cette petite com­mune vous dit quelque chose ? C’est nor­mal : lors du dernier con­grès de la FUB, Séné a reçu le sec­ond prix au 2ème Baromètre des villes cyclables dans la caté­gorie des villes de moins de 20 000 habi­tants. Avec 140 répons­es, la ville obtient une note de 4,23/6. Le cli­mat vélo y est donc con­sid­éré comme « favor­able ».

Les meilleures notes ont été obtenues sur les points suiv­ants :

  • lesef­forts faits par la ville en faveur
    du vélo sont impor­tants ;

• se déplac­er à vélo dans la ville
est agréable ;

• la mairie est à l’écoute des besoins des usagers du vélo ;

• la com­mu­ni­ca­tion en faveur des déplace­ments à vélo est impor­tante ;

• les itinéraires cyclables sont con­fort­a­bles ;

• les itinéraires cyclables sont entretenus;

• on peut cir­culer à vélo en sécu­rité
dans les rues rési­den­tielles.

Com­ment cette petite com­mune a-t-elle mis en place une dynamique pro-vélo pour tous les types d’usages (util­i­taire ou loisirs) ? Enquête en Bre­tagne sur les efforts menés par la munic­i­pal­ité.

Une politique vélo qui a débuté dès 2011

Séné a élaboré un sché­ma directeur des pistes cyclables en 2011. Ce doc­u­ment, inscrit dans une poli­tique glob­ale de tran­si­tion écologique et énergé­tique, vise à inciter les habi­tants à utilis­er ce mode de déplace­ment pour aug­menter le nom­bre de déplace­ments à vélo du quo­ti­di­en et deloisirs. Il s’agit ain­si de réduire l’impact des pol­lu­tions liées à l’usage de la voiture indi­vidu­elle, mais aus­si d’encourager le plus grand nom­bre à la pra­tique d’une activ­ité physique.

Dans la dernière man­da­ture (20142020), deux pro­jets struc­turants ont été réal­isés :

• l’aménagement d’une piste cyclable entre le Pont Lisse (à la sor­tie du bourg, der­rière le Pôle Enfance) et le chemin d’exploitation du Mor­boul, qui s’est achevé en 2017;

• la réal­i­sa­tion d’une por­tion de piste cyclable sur la route de l’Hippodrome (ouver­ture au print­emps 2019), per­me­t­tant de reli­er facile­ment Le Poul­fanc au cen­tre-bourg.

La com­mune a béné­fi­cié du Fonds de mobil­ité active de l’État pour réalis­er trois de ses pro­jets, ain­si que de sub­ven­tions de l’agglomération de Vannes.

La constitution d’un véritable « système vélo » à l’échelle communale

Séné a réus­si à se démar­quer au Baromètre des villes cyclables grâce à la mise en place pro­gres­sive d’un véri­ta­ble « sys­tème vélo » favor­able à l’usage de la bicy­clette. Plusieurs exem­ples con­crets :

• un mail­lage cyclable assez com­plet autour du cen­tre-bourg et pour rejoin­dre les com­munes voisines. Les amé­nage­ments emprun­tés sont très fréquem­ment en site pro­pre et sont très roula­bles (réal­isés en enrobé). Ils sont, de plus, plutôt bien con­nec­tés entre eux aux grandes inter­sec­tions. Il manque cepen­dant un tronçon à amé­nag­er en site pro­pre entre Séné et Vannes ;

• le cen­tre-ville est entière­ment passé en zone de ren­con­tre ;

• des sta­tion­nements en nom­bre ont été implan­tés dans les prin­ci­paux pôles d’intérêt de la com­mune (mairie, arrêts de bus à l’entrée de la com­mune, cen­tre cul­turel « Grain de Sel », abor­ds des plages etc) ;

• un bac adap­té à l’accueil des vélos a été mis en place pour rejoin­dre la com­mune de St-Armel (pas­sage d’un chenal du golfe du Mor­bi­han) ;

• l’aménagement d’une rue sco­laire avec une fer­me­ture à la cir­cu­la­tion des véhicules motorisés (fer­me­ture défini­tive). Cet amé­nage­ment encore peu répan­du en France per­met de met­tre en sécu­rité les écol­iers aux entrées et sor­ties de l’école et d’inciter les par­ents à accom­pa­g­n­er leurs enfants à pied ou à vélo.

La maire, Sylvie Scu­lo, que nous avons pu ren­con­tr­er lors de notre pas­sage, estime que les efforts menés par la munic­i­pal­ité sont de plus en plus payants : « Nous voyonsde plus en plus de nos habi­tants emprunter leur vélo pour aller au tra­vail tout au long de  l’année, prin­ci­pale­ment vers Vannes qui est le prin­ci­pal pôle d’emploi de l’agglomération ».

La preuve que le vélo est de plus en plus util­isé ? « Les espaces dédiés aux sta­tion­nements des vélos sont de plus en plus prisés. Cer­tains vien­nent à man­quer depuis quelques mois ». Et cela n’est sûre­ment pas unique­ment  lié à l’impact de la Covid-19. À Séné, les efforts réal­isés par la munic­i­pal­ité ont un impact pro­gres­sif sur les habi­tudes de mobil­ités des habi­tants depuis plusieurs années déjà.

Marseillan (34), le bon sens cyclable !

Mar­seil­lan, petite ville héraultaise au bord de l’étang de Thau et de la Méditer­ranée, est arrivée en févri­er dernier troisième de sa caté­gorie au Baromètre des villes cyclables. Nous avons ren­con­tré la Roue Libre de Thau, l’association FUB locale et Yves Michel, maire depuis 2008, pour ten­ter de com­pren­dre les clés du suc­cès de la sta­tion bal­néaire.

Une situation géographique idéale

Selon Daniel Rigaud, secré­taire de la Roue Libre de Thau, ce résul­tat est en grande par­tie dû au posi­tion­nement géo­graphique favor­able de la ville. En effet, le canal du Midi, très prisé par les cyclo­touristes, débouche sur la com­mune qui se trou­ve égale­ment sur
l’itinéraire de l’Euro-vélo 8 (la Méditer­ranéenne à vélo).

Mais à Mar­seil­lan, les touristes n’arrivent pas tous à vélo. La com­mune compte 8 000 habi­tants à l’année, mais
60 000 habi­tants pen­dant l’été. Nos échanges avec Yves Michel et son adjoint à la mobil­ité et aux déplace­ments Dominique Cupoli nous ont per­mis de com­pren­dre que la cycla­bil­ité de la ville est le fruit d’une réelle réflex­ion pour répon­dre aux prob­lé­ma­tiques de mobil­ité que cet afflux de masse provoque annuelle­ment.

En effet, la ville se divise en deux pôles dis­tincts : Mar­seil­lan-Ville, où se con­cen­tre l’activité tout au long de l’année et Mar­seil­lan-Plage, qui accueille plus de 80% des esti­vants. En con­séquence, les com­merçants de Mar­seil­lan-Ville ne prof­i­taient pas de la présence des vacanciers à Mar­seil­lan-plage. La solu­tion ? La créa­tion d’une piste cyclable en site pro­pre qui relie les deux pôles. Inau­gurée en 2012, celle-ci rem­porte depuis un franc suc­cès, d’autant plus que les vacanciers sont essen­tielle­ment accueil­lis en héberge­ment de plein air, où l’usage de la voiture est peu appré­cié et crée rapi­de­ment de la con­ges­tion.

Un réseau large

Cet amé­nage­ment s’insère aus­si dans un réseau plus large avec des liaisons vers Agde et Sète, dévelop­pées avec l’Agglopôle Sète Méditer­ranée et le départe­ment de l’Hérault. Depuis 2019, un ser­vice de vélos élec­triques
« libre-ser­vice » a égale­ment été mis en place, avec 4000 loca­tions en deux ans de ser­vice. Si Daniel Rigaud salue ces avancées, il note tout de même que de nom­breux autres axes vers les vil­lages voisins restent très hos­tiles aux per­son­nes à vélo. Notre tour de la ville nous a égale­ment per­mis de con­stater que de nom­breuses pistes cyclables, notam­ment dans les par­ties urbaines, sont des voies partagées avec les pié­tons. La volon­té de pren­dre de la place à la voiture n’est pas encore très affir­mée, même si dans la rue com­merçante de Mar­seil­lan plage, il est prévu de fer­mer un sens de cir­cu­la­tion pen­dant la sai­son touris­tique pour ten­ter de con­va­in­cre les com­merçants, pour l’instant réti­cents.

Et si la dynamique actuelle était motivée par le secteur touris­tique en pre­mier lieu, l’équipe munic­i­pale se penche désor­mais sur le vélo comme moyen de val­oris­er les activ­ités économiques tra­di­tion­nelles de conchyli­cul­ture et de viti­cul­ture. Son ambi­tion est revue
à la hausse avec 30 nou­veaux kilo­mètres de pistes cyclables prévus sur le man­dat en cours. Ren­dez-vous en 2021 pour voir si ces efforts per­me­t­tent à la ville de grimper encore plus haut dans le pal­marès des villes cyclables.

Flo­ri­an Le Vil­lain, Charles Das­sonville et Lau­rent Raf­fi­er

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