Désormais Baromètre peut s’écrire avec une majuscule, et pour peu qu’on fasse un peu de vélo on sait tout de suite de quoi il s’agit. Au-delà de la satisfaction accordée aux villes qui sont montées sur le podium, et aux associations directement concernées par un bon classement, l’intérêt du Baromètre des villes cyclables est bien, comme l’a rappelé le président Olivier Schneider avant la proclamation des résultats le 16 mars, d’« identifier les priorités et vraiment investir là où les Françaises et les Français l’attendent pour amener à portée de tous la mobilité à vélo ».
Des notes souvent très moyennes
Seules 316 villes ont obtenu un taux de réponses suffisamment significatif pour être prises en compte dans le classement. Rappelons que les répondants devaient noter de 1 à 6 chacune des 27 propositions de l’enquête en ligne de l’automne dernier, en fonction de leur ressenti personnel. La moyenne de chaque ville s’établissait par la synthèse de toutes les notes moyennes constatées, aspect qui apparaît dans le classement sur une échelle de A à G, assortie d’un code couleur. Et c’est à partir de ces notes qu’a été fait le classement, avec ses podiums(1).
Seulement 21 villes en France ont obtenu une note supérieure à la moyenne, dont 15 se retrouvent sur un podium. Ce qui veut dire que, globalement, les participants ont estimé que l’accueil fait au vélo dans les villes n’est pas à la hauteur de leurs attentes, et que certaines troisièmes places au podium ne sont pas synonymes d’excellence. On verra bien dans deux ans (périodicité annoncée pour renouveler l’enquête) si les usagers font monter le niveau général des notes. C’est le but du jeu dans la durée.
Les efforts des petits
Ce premier Baromètre, c’est aussi l’occasion de focaliser sur des petites villes dont on n’entend pas beaucoup parler, alors que la vie du citoyen qui s’y déplace à vélo a autant d’importance que dans les grosses agglomérations. Il faut rappeler aussi, comme l’a fait le représentant des maires ruraux de France, que « plus de 80 % des communes traversées par le schéma des véloroutes et voies vertes sont des communes rurales ». Et qu’il faut « permettre que ces itinéraires ne soient pas seulement des itinéraires de loisir ».
Nuance importante : on reste tout de même dans l’urbain sur le podium de la première catégorie du Baromètre, celle des moins de 20 000 habitants. Surtout s’agissant de Sceaux et Sélestat, intégrées dans un tissu très urbanisé. Seule La Flèche, bourg de 16 000 habitants dans la campagne sarthoise, est représentative de ce milieu rural auquel le monde du vélo s’intéresse de plus en plus, tant pour le développement du tourisme que pour les déplacements au quotidien.
« A vélo on va plus vite »
Petits messages de ces petites communes à toutes les autres. Pour le maire de Sélestat Marcel Bauer, « il faut commencer très jeune » si on veut voir plus tard les adultes à vélo. Pour Patrice Pattée, adjoint au maire de Sceaux, l’important est le message qu’on envoie aux automobilistes : « leur montrer qu’effectivement à vélo on va plus vite. » Tandis qu’à La Flèche, l’adjoint Nicolas Chauvin souligne tout l’intérêt du « travail en concertation » avec les associations locales.
Le dynamisme du milieu associatif a été souligné par d’autres représentants de villes bien classées. C’est gagnant à tous les étages : le Baromètre est révélateur de la fécondité de certains échanges au niveau local, tandis qu’au niveau national il est déjà porteur d’espoirs sans précédent.
Jean-Michel Trotignon
(1) voir le détail sur www.parlons-velo.fr.
Ajaccio, sur le podium des plus mauvais
L’un des buts du Baromètre est de faire progresser les moins bons. A Ajaccio, c’est comme ça qu’on prend la chose…
« C’est sans grande surprise qu’Ajaccio se qualifie comme la PIRE VILLE de 50 à 100 000 habitants en termes de « cyclabilité » et se trouve 2e ex-aequo avec Marseille sur l’ensemble des communes françaises ». En regardant la réalité en face, les membres de l’association Velocità n’entendent pas pour autant perdre le moral, ni l’envie de pédaler.
Leur analyse des résultats détaillés pour leur ville, dont la note moyenne plafonne à 1,98 sur 6 (comme Marseille), fait apparaître comme seul point fort la faible fréquence des vols de vélo. C’est la note sur le confort qui est la plus mauvaise donnée par les 257 répondants d’Ajaccio, suivie de près par la mauvaise note attribuée à la sécurité. A noter que c’est l’usage sportif qui arrive chez eux légèrement devant l’utilitaire domicile-travail.
Et logiquement on trouve, largement en tête des préconisations des répondants : un réseau cyclable sans coupures, et des itinéraires directs et rapides.
Leur conclusion garde une bonne dose d’optimisme : « Les résultats de cette enquête confirment ce que nous ressentons pour une grande majorité en tant que cyclistes à Ajaccio, à savoir qu’il est souvent difficile de trouver notre place dans la circulation avec la sensation de ne pas y être en sécurité. Malgré tous ces mauvais résultats, l’association Velocità a pu constater un changement concernant l’intérêt que les collectivités portent à la question de la mobilité cycliste. En effet, par notre participation à plusieurs réunions de travail concernant l’aménagement d’une partie de la voirie de notre ville (projet INTENSE avec la mairie, boucle cyclable de la CAPA, requalification de la rocade par la Collectivité de Corse, etc.), nous avons ressenti une réelle volonté de prendre en compte nos remarques et suggestions afin que l’usage de l’espace public soit le plus confortable pour tous. Vivement le prochain Baromètre cyclable qui pourra mesurer les progrès réalisés afin qu’Ajaccio devienne enfin la ville impériale du vélo ! »
Strasbourg toujours en tête
On les attendait un peu, ils sont bien là, dans les premiers de leurs catégories : La Rochelle, Grenoble, Strasbourg.
« Même à Strasbourg, il faut qu’on continue nos efforts », a souligné l’adjoint au maire et député Jean-Baptiste Gernet, rappelant que « c’est par la mobilisation citoyenne que Strasbourg a débuté, et qu’« on a besoin de la mobilisation des citoyens, de leur rage pour faire avancer le vélo », rendant hommage au Strasbourgeois Jean Chaumien, fondateur de la première association locale, qui allait donner naissance à la Fubicy.
A Grenoble, « on sait qu’il nous reste plein de choses à faire », a déclaré le maire Eric Piolle, qui n’a pas évoqué les associations locales dans son discours. Le président de la métropole grenobloise (49 communes), Christophe Ferrari, a pour sa part mis l’accent sur la nécessité de développer le vélo dans l’urbain en terrain plat, mais aussi « dans la montagne ».
A La Rochelle, l’adjoint Jean-Marc Soubaise voit dans sa première place « la récompense d’une histoire », et n’a pas hésité à dire clairement « que parfois il faut prendre des décisions en faveur du vélo, et donc parfois contre les automobilistes ».
Inattendue en revanche cette première place des villes moyennes, dont les non-Alsaciens auront du mal à retenir le nom : Illkirch Graffenstaden, en banlieue de Strasbourg. Mais pas trop surprenante pour son adjoint Richard Hann, qui a suivi toute l’évolution de l’agglomération depuis les années 70, et a donné sa petite explication à la complicité cyclable avec la ville centre : « nous avons un canal qui nous emmène au centre de Strasbourg ».