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Mobilité et valeur du temps : que vous apportent réellement vos déplacements ?

MoTiV, un projet ambitieux

Le temps a-t-il la même valeur pour un voyageur se reposant dans un bus con­fort­able, pour le vélotafeur dont l’itinéraire longe un canal, ou pour l’automobiliste stressé au volant ? Le but du pro­jet MoTiV est de redéfinir la valeur du temps de tra­jet, en prenant en compte les envies des usagers et leurs activ­ités pen­dant leurs déplace­ments. En économie des trans­ports, le temps est une « con­som­ma­tion con­trainte » et il est con­sid­éré com­ment une vari­able à min­imiser pour nos déplace­ments. Dans une société où l’on court con­stam­ment après le temps, et où les déplace­ments domi­cile-tra­vail pren­nent en moyenne deux ans de notre vie, le pro­jet MoTiV se tourne vers la val­ori­sa­tion de l’usage de ce temps et l’utilité perçue.

Le con­sor­tium du pro­jet MoTiV com­prend six prin­ci­paux parte­naires européens dont l’ECF (Euro­pean Cyclists’ Fed­er­a­tion). Pour éten­dre la portée du pro­jet sur dix pays européens, l’ECF a man­daté qua­tre de ses mem­bres (dont la FUB) pour venir en appui au pro­jet.

Pourquoi s’engager dans le pro­jet MoTiV ?

La FUB  s’est engagée dans le pro­jet MoTiV pour trois raisons : l’occasion de faire par­tie d’un pro­jet de recherche européen (notre pre­mier !), for­mer des liens plus forts avec sa fédéra­tion européenne, l’ECF, et enfin s’extraire des débats habituels sur les change­ments de mobil­ité. « Nous avons besoin de temps », dis­ait Edouard Philippe lors de l’annonce du plan vélo. Et si nous avions sim­ple­ment besoin de mieux l’utiliser ? La FUB est per­suadée que le vélo est le mode de trans­port le plus rapi­de en milieu urbain, les études le prou­vent, mais pour l’usager seul le temps perçu fait foi.

On vous invite à vous lancer dans l’utilisation de Woor­ti pour de nom­breuses raisons : au niveau indi­vidu­el pour en savoir plus sur vous-mêmes, et pour soutenir les chercheurs qui ten­tent de faire évoluer les con­cepts de base de l’économie des trans­ports ; au niveau col­lec­tif parce qu’une fois les don­nées agrégées en sta­tis­tiques, on peut pari­er sur des argu­ments sup­plé­men­taires en faveur du vélo.

La perception du temps est une notion individuelle

Cha­cun perçoit son temps dif­férem­ment : trop long, trop lent lorsqu’il est déplaisant, trop rapi­de lorsqu’on y prend du plaisir ou qu’on est pro­duc­tif. Les chercheurs pro­posent une déf­i­ni­tion de l’utilité perçue d’un déplace­ment, qui repose sur trois caté­gories : « pro­duc­tiv­ité » pour la réal­i­sa­tion de tâch­es per­son­nelles ou pro­fes­sion­nelles, « plaisir » lorsqu’on se repose et qu’on se détend lors du tra­jet et « con­di­tion physique » pour ceux qui réalisent leur exer­ci­ce quo­ti­di­en et se main­ti­en­nent en forme.

Cet usage de notre temps dépend des modes de déplace­ment à dis­po­si­tion, des con­traintes organ­i­sa­tion­nelles, des besoins indi­vidu­els et pour beau­coup du con­texte cul­turel et édu­ca­tion­nel. Il faut donc définir les fac­teurs les plus influ­ents sur l’utilité ressen­tie du temps de tra­jet et par con­séquent, ceux qui influ­en­cent nos choix en matière de déplace­ments. Comme il n’existe aucun con­texte ana­ly­tique antérieur, c’est l’approche sta­tis­tique qui est choisie avec une récolte mas­sive de don­nées à tra­vers l’Europe (échan­til­lon de 5 000 usagers visé). Rien de tel qu’une appli­ca­tion smart­phone pour cela.

Woorti : mettez-vous vos déplacements à profit ?

L’application Woor­ti, disponible sur Google Play et l’App Store, récolte d’une part vos don­nées pour les besoins du pro­jet MoTiV, et d’autre part donne l’occasion de se ren­dre compte de l’utilité perçue de vos déplace­ments. Seules les don­nées agrégées et anonymisées seront com­mu­niquées aux parte­naires du pro­jet et pour les besoins de la recherche. Pour l’utilisateur, l’application ren­voie des sta­tis­tiques sur le temps de tra­jet et les dis­tances par­cou­rues ain­si que l’utilité perçue selon les préférences choisies et les répons­es fournies sur la per­cep­tion et les activ­ités lors des tra­jets. Si vous voulez vous com­par­er avec vos col­lègues ou les autres usagers de votre ter­ri­toire, l’application dis­pose d’un sys­tème de points qui per­met un classe­ment des par­tic­i­pants. Peut-être même que votre employeur pour­rait prof­iter de l’application pour un chal­lenge mobil­ité ?

Par­ticipez à notre col­lecte de don­nées !

En France, la FUB cherche la par­tic­i­pa­tion d’un min­i­mum de 700 usagers, tous modes de trans­port con­fon­dus.

  • Pour que votre par­tic­i­pa­tion soit exploitable, il faut :
  • Com­pléter entière­ment votre pro­fil util­isa­teur ;
  • Utilis­er Woor­ti pen­dant 14 jours (pas for­cé­ment con­sé­cu­tifs) ;
  • Pour chaque journée : au moins un tra­jet où l’utilisateur four­nit un retour d’expérience ;
  • Répon­dre à 50 % des enquêtes pro­posées par Woor­ti.

Pour que Woor­ti puisse vous apporter plus de retours sur l’utilité de vos déplace­ments, cor­rigez et validez a min­i­ma le mode de déplace­ment util­isé.

Col­lecte de don­nées entre mai et octo­bre 2019.

 

Retour sur la Table ronde Mobil­ité et per­cep­tion du temps le 18 avril à Greno­ble

La FUB a organ­isé le 18 avril dernier à la COOP Info­Lab la Péniche à Greno­ble un débat sur la mobil­ité et la per­cep­tion du temps, avec la par­tic­i­pa­tion de Sylvie Lan­driève, co-direc­trice du Forum Vies Mobiles, Matthieu ADAM, chercheur à l’ENTPE-LabeX IMU et Olivi­er Schnei­der, prési­dent de la FUB.

Com­ment percevez-vous votre temps de déplace­ment ? C’est la ques­tion qui était posée aux par­tic­i­pants. La per­cep­tion du temps est en effet unique à cha­cun et intime­ment liée à notre mode de trans­port.

Tou­jours plus loin, tou­jours plus vite… que ce soit pour les véhicules indi­vidu­els ou pour les marchan­dis­es, la dis­tance ne doit plus être une lim­ite. Cette vitesse, ou pos­si­bil­ité de vitesse, est un stress pour notre cerveau. Elle sem­ble aus­si déter­min­er une cer­taine hiérar­chie sociale, d’où peut-être l’attachement à la voiture de la part de cer­taines pop­u­la­tions. Les infra­struc­tures per­me­t­tant les grandes vitesses sont aus­si sources de coupures pour les modes de déplace­ment plus lents. Il est devenu plus aisé de par­courir des dizaines de kilo­mètres entre la ville et la cam­pagne plutôt que de faire quelques kilo­mètres en milieu péri­ur­bain.

D’ailleurs, qu’est-ce qu’un déplace­ment ? Com­ment faire pour décar­bon­ner ces flux de per­son­nes et de marchan­dis­es, dans un con­texte où tout doit tou­jours être plus rapi­de car le temps de déplace­ment n’a pas de valeur économique ? En voulant don­ner à tous le moyen d’aller vite, partout, n’importe quand, la société s’est créée un besoin qui n’existait pas 100 ans plus tôt : celui d’être mobile à tout prix.

La solu­tion pour prof­iter au mieux de notre temps serait de moins le pass­er en déplace­ments, ou bien en déplace­ments plus lents, telle fut la con­clu­sion de cette soirée-débat.

Pour en savoir plus :

Un article à lire aussi dans Vélocité n°151 — mai-juin 2019, une publication de la FUB.