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Comment Nottingham a développé les mobilités actives grâce à un impôt sur le stationnement au travail

Une loi votée début octo­bre per­met désor­mais aux villes écos­sais­es de met­tre en place un impôt sur le sta­tion­nement dans les lieux de tra­vail et d’investir ses recettes dans des infra­struc­tures cyclables ou dans l’amélioration des trans­ports en com­mun. Glas­gow et Edim­bourg vont prob­a­ble­ment pren­dre cette loi à bras le corps, et elles pour­ront s’appuyer sur l’exemple de Not­ting­ham, en Angleterre, où un impôt sur le sta­tion­nement est en place depuis 2012.

Une innovation politique

Ce pro­jet a déjà per­mis de récolter 61 mil­lions de livres que la munic­i­pal­ité réin­vestit dans des mesures visant à réduire l’utilisation de la voiture.

Les entre­pris­es doivent vers­er à la ville de Not­ting­ham 415 £ par place de park­ing par an. Cet impôt a con­sid­érable­ment amélioré la qual­ité de l’air dans la ville car moins de per­son­nes vont désor­mais au tra­vail en voiture. Les émis­sions de CO2 ont chuté de 25 % depuis 2015.

Pour se déplac­er à Not­ting­ham, rési­dents et touristes peu­vent prof­iter du réseau de tramway, qui a coûté £580 mil­lions, et dont les derniers tronçons ont été en par­tie financés par l’impôt sur le sta­tion­nement.

La munic­i­pal­ité de Not­ting­ham a égale­ment pris de l’espace à la voiture pour créer des amé­nage­ments cyclables afin de per­me­t­tre aux citoyens de cette ville des Mid­lands de se déplac­er à vélo plus facile­ment et en sécu­rité.

Canal Street, autoroute urbaine proche de la gare de Not­ting­ham et paralysée par les bou­chons, fait l’objet d’un réamé­nage­ment visant à sup­primer des voies de cir­cu­la­tion, dans le con­texte du pro­jet « South­ern Gate­way » (bud­get £250 mil­lions) qui ver­ra aus­si la pié­ton­i­sa­tion inté­grale de cer­taines rues voisines. Selon la munic­i­pal­ité de Not­ting­ham, cette régénéra­tion urbaine qui remet l’humain au cœur de la ville per­me­t­tra la créa­tion de 532 emplois à plein temps ain­si que 2 300 emplois indi­rects.

Les entreprises soutiennent la mesure

Dans le Finan­cial Times, David Mellen, élu munic­i­pal, explique que l’impôt sur le sta­tion­nement a ini­tiale­ment fait polémique : « La cham­bre de com­merce s’y oppo­sait fer­me­ment. Selon eux, les entre­pris­es allaient quit­ter Not­ting­ham et les investis­seurs ne viendraient plus ».

C’est le con­traire qui s’est passé. Depuis 2012, le nom­bre d’entreprises dans la ville a aug­men­té de près de 25 %. Il y a eu une aug­men­ta­tion nette de 23 400 emplois. La nou­velle por­tion du réseau de tramway, con­stru­ite en 2015, s’étend désor­mais au sud de la ville, atteignant ain­si 20 des 30 plus impor­tants employeurs de la zone urbaine.

Exper­ian, une agence de nota­tion, 3 000 employés à Not­ting­ham, a décidé de  pren­dre en charge l’impôt sur le park­ing pour ceux qui con­tin­u­ent à venir en voiture, en met­tant en avant le fait que le développe­ment du tram et les autres mesures visant à lim­iter l’utilisation de la voiture « améliorent l’image de la ville.»

Des alternatives efficaces à la voiture

L’utilisation de la voiture à Not­ting­ham a chuté de 7 % depuis 2002, alors que dans le même temps, l’utilisation des trans­ports en com­mun a elle aug­men­té de 7 %.

« La plu­part des gens à Not­ting­ham n’ont pas de voiture », explique Mellen au Finan­cial Times. « Aller au tra­vail en voiture n’est pas un droit. »

Adele Williams, élue aux trans­ports à Not­ting­ham, explique : « La clé pour garder un sys­tème de trans­port effi­cace, c’est de pro­pos­er aux gens une alter­na­tive à la voiture effi­cace et fiable. Actuelle­ment, 40 % des tra­jets vers le cen­tre-ville se font en trans­port en com­mun — bien au delà de la moyenne nationale — et ce chiffre aug­mente d’année en année. »

Les employés munic­i­paux qui gar­ent leur voiture au tra­vail sont eux oblig­és de pay­er l’impôt. Mais le park­ing vélo souter­rain sécurisé à l’hôtel de ville est très util­isé. Et pour ses tra­jets pro­fes­sion­nels, le per­son­nel a à sa dis­po­si­tion une flotte de vélos élec­triques Raleigh. Devant l’hôtel de ville, il y a égale­ment une sta­tion City­card, les vélos en libre-ser­vice de la ville financés par l’impôt sur le park­ing.

Tom Humphries, plan­i­fi­ca­teur des trans­ports pour la ville, nous a fait décou­vrir le réseau cyclable éten­du de la ville, notam­ment de larges voies cyclables le long d’artères majeures et du tramway où, jusqu’en 2012, le traf­ic de tran­sit auto­mo­bile était encore autorisé.

Le périphérique encom­bré de Not­ting­ham a été con­stru­it à la fin des années 1920 pour génér­er de l’emploi et dans les années 1930, on a rajouté aux grandes artères des pistes cyclables pro­tégées. La mairie a récem­ment rénové de nom­breuses routes qui croisent ces pistes cyclables, et le mar­quage au sol donne désor­mais la pri­or­ité aux cyclistes qui vont tout droit plutôt qu’aux auto­mo­bilistes qui coupent leur chemin.

Un tweet du compte offi­ciel de la ville le 16 octo­bre 2019 déclare : « Nous avons mon­tré que les trans­ports en com­mun et le vélo peu­vent rem­plac­er la voiture pour la plu­part des gens. »

Mohamed Mezghani, secré­taire général de l’Union Inter­na­tionale des Trans­ports Publics (UITP), asso­ci­a­tion inter­na­tionale des trans­ports publics basée à Brux­elles, vient ampli­fi­er ce point de vue : « Un impôt sur le park­ing, tout comme un péage urbain, est une manière de décourager l’utilisation de la voiture.»

« Il est impor­tant que ses revenus soient util­isés pour financer le développe­ment de solu­tions de mobil­ités alter­na­tives », ajoute-t-il.

Carl­ton Reid
Paru sur www.forbes.com

Un article à lire aussi dans Vélocité n°154 — janvier-février-mars 2020, une publication de la FUB.