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Les vélos en free floating : quels impacts sur les mobilités actives ?

Méthodologie de l’enquête

Grâce à une appli­ca­tion dédiée, les vélos en free float­ing sont acces­si­bles n’importe où par l’usager, qui peut les emprunter et les dépos­er où il le souhaite. A par­tir d’octobre 2017, plus de 15 000 vélos flot­tants ont été déployés en France, dont 8 000 à Paris. Cette offre a ain­si con­nu un développe­ment très rapi­de et représente aujourd’hui 20 % de l’offre des vélos partagés. Cepen­dant, les VFF soulèvent des enjeux en ter­mes d’occupation de l’espace pub­lic et peu­vent représen­ter une forme de con­cur­rence pour les sys­tèmes de VLS en sta­tion déjà présents dans les villes.

Aucune étude n’avait jusqu’alors analysé l’impact de ces offres sur l’écosystème de la mobil­ité. Une enquête a donc été menée par 6-T bureau de recherche et dif­fusée par Ofo et Mobike après de leurs usagers sur Paris sous forme d’un ques­tion­naire web entre le 26 sep­tem­bre et le 28 octo­bre 2018. 2 349 répon­dants (sur un total de 3 452 répons­es) avaient réal­isé au moins un tra­jet en VFF dans le mois précé­dant l’enquête.

Le VFF, préféré par les jeunes cadres diplômés et non familiers du vélo

Le pro­fil des usagers de VFF s’apparente à celui des cyclistes qui ont leur pro­pre vélo ou aux usagers de Vélib’ dans Paris. Ain­si, il s’agit majori­taire­ment de jeunes (60 % ont moins de 35 ans), plutôt cadres et/ou pro­fes­sion intel­lectuelle supérieure (68 %), mas­culins (66 %) et diplômés bac + 5 (43 %) ou plus (17 %). Les étu­di­ants représen­tent égale­ment un usager sur cinq, la pop­u­la­tion cycliste parisi­enne étant com­posée à 23 % d’étudiants et de sco­laires.

40 % des util­isa­teurs d’Ofo ou Mobike n’utilisaient jamais de vélo avant d’utiliser un VFF, qu’il s’agisse d’un vélo per­son­nel ou en loca­tion. Seuls  20 % d’entre eux util­i­saient déjà un vélo quo­ti­di­en­nement ou presque.

Le VFF, un marché innovant et complémentaire des autres modes de transport

Les VFF facili­tent la com­plé­men­tar­ité avec les autres modes, notam­ment avec les trans­ports en com­mun. En effet, ils attirent aus­si bien les usagers des trans­ports en com­mun cher­chant un tra­jet plus flu­ide, « sans cou­ture », avec la pos­si­bil­ité du porte-à-porte, et rapi­de, que les pié­tons qui souhait­ent gag­n­er sur leur temps de par­cours. En effet, plus d’un quart des sondés (27 %) ont réal­isé un déplace­ment inter­modal (cumu­lant au moins deux modes de trans­port) lors de leur dernier tra­jet avec un VFF (pour 73 % d’entre eux, le mode com­biné était les trans­ports en com­mun).

Le plus gros obsta­cle à l’emprunt reste la disponi­bil­ité des vélos. En effet, 63 % des util­isa­teurs ont déclaré qu’ils leur arrive « par­fois » ou « sou­vent » de marcher plus longtemps qu’ils ne le souhait­eraient pour accéder à un vélo. De même, 70 % des usagers ont déjà été con­fron­tés au prob­lème d’une absence de vélo à prox­im­ité.

Des trajets courts, ponctuels et pour les loisirs

Les résul­tats de l’étude mon­trent que le VFF est plus util­isé pour des tra­jets courts, avec une durée moyenne de 21 min­utes (ce qui cor­re­spond au pre­mier palier de tar­i­fi­ca­tion de ces vélos, à savoir 20 min­utes), auquel il faut ajouter un temps de marche moyen de 5 min 30 pour accéder au vélo. Les usagers qui ont fait au moins une loca­tion ont réal­isé en moyenne 4,8 loca­tions par mois, ce qui est plus faible que celle des abon­nés au Vélib’ qui en 2016 réal­i­saient en moyenne 10 déplace­ments par mois. A not­er que moins d’un cinquième des usagers emprun­tent un VFF plus d’une fois par semaine.

Les tra­jets sont majori­taire­ment effec­tués dans le cadre des loisirs (36 % des déplace­ments) plutôt que pour des tra­jets domi­cile-tra­vail (21 %) et ont lieu aus­si sou­vent le week-end que la semaine, alors que les Fran­ciliens réalisent moins de déplace­ments les samedis et dimanch­es que les autres jours de la semaine. « Plus sou­vent que pour les autres modes, les VFF sont ain­si util­isés pour des tra­jets reliant des lieux qui ne s’inscrivent pas dans la rou­tine quo­ti­di­enne des indi­vidus », pré­cise l’étude.

Une influence modérée sur la pratique des autres modes

« Le VFF (…) ne rem­place pas une pra­tique pré-exis­tante, mais les font évoluer à la marge en offrant de nou­velles pos­si­bil­ités sur cer­tains tra­jets », indique l’étude. Ain­si, elle note une diminu­tion de faible inten­sité de la fréquence d’usage de la marche et des trans­ports en com­mun. 45 % des répon­dants esti­ment que cette offre a mod­i­fié leur usage des trans­ports en com­mun. Con­cer­nant la marche, 32 % esti­ment avoir changé leurs habi­tudes.

« La pra­tique des véhicules motorisés per­son­nels (voiture et moto ou scoot­er) décroit de façon sig­ni­fica­tive », con­state l’étude. Cette baisse n’a cepen­dant pas d’impact sur le niveau d’équipement ». L’utilisation de VFF dimin­ue le recours à des taxis : avant l’utilisation des VFF, 8 % des usagers ne l’utilisaient jamais, après cette part monte à 27 %. Ce con­stat est égale­ment val­able mais dans une moin­dre mesure pour les véhicules de tourisme avec chauf­feur (VTC). « La fréquence d’usage de voitures en autopartage décroît elle aus­si : le taux de per­son­nes qui déclar­ent ne jamais en utilis­er passe de 21 % à 47 %. Il est pos­si­ble cepen­dant de sup­pos­er que cette évo­lu­tion est en grande par­tie due à l’arrêt du ser­vice Autolib’ en juil­let 2018 », note l’étude.

En revanche, la pra­tique du deux-roues motorisé partagé évolue peu et celle des vélos per­son­nels ne change pas. Con­cer­nant les vélos en libre-ser­vice avec bornes, 55 % des enquêtés qui ont fait au moins un tra­jet en VFF dans le mois n’avaient jamais fait de Vélib’ aupar­a­vant. Les VFF créent donc en par­tie un marché nou­veau. Cepen­dant, pour plus de deux cinquièmes d’entre eux, l’adoption des VFF n’a pas influ­encé leurs pra­tiques du Vélib’, les deux ser­vices étant dis­tincts et com­plé­men­taires pour eux. Seuls 23 % des usagers ont arrêté d’utiliser des Vélib.

Perspectives

On voit donc appa­raître des pra­tiques pro­pres aux vélos en free float­ing : ils répon­dent à des deman­des sur les déplace­ments « les moins struc­turants et les plus dif­fus du quo­ti­di­en, demande sur laque­lle les ser­vices de mobil­ité ont sou­vent du mal à se posi­tion­ner ».

L’étude con­clut toute­fois qu’en rai­son de la nou­veauté de ce ser­vice, et du change­ment d’opérateur du ser­vice Vélib’ à Paris, au moment où l’étude a été réal­isée, il sera utile d’étudier ces artic­u­la­tions lorsque la sit­u­a­tion se sera sta­bil­isée.

Source : ADEME

Note :

(1) Etude com­plète disponible sur goo.gl/69jNii

Un article à lire aussi dans Vélocité n°150 — mars-avril 2019, une publication de la FUB.