Une votation suisse qu’est-ce que c’est ?
Les citoyens suisses sont souvent amenés à se prononcer sur des sujets relatifs à la politique fédérale, cantonale ou communale, que ce soit pour des initiatives populaires ou pour des référendums (projets de loi). La particularité d’une votation : elle est contraignante et elle doit être appliquée telle que proposée si elle est acceptée.
Dimanche 23 septembre, trois sujets étaient soumis à votation : deux initiatives agricoles et un arrêté fédéral qui inscrit le vélo dans la constitution suisse.
La constitution suisse décrit le fonctionnement et les prérogatives de l’état fédéral suisse. Pour éviter toute modification à la va vite, la constitution ne peut être modifiée que par une votation à double majorité : les citoyens et les cantons. Le 23 septembre, le vélo a obtenu 73.6 % de oui citoyens et plus de 20 cantons (26 au total).
Une impulsion citoyenne et suivie
Suite au dépôt d’une initiative populaire débutée fin 2015, le conseil fédéral propose un contre-projet courant 2016. En mars 2018, ce contre-projet obtient l’approbation des chambres et peut donc être soumis à votation, en concurrence de l‘initiative populaire. Cette dernière est alors retirée, le projet proposé par le fédéral étant très proche de la proposition populaire initiale. Alors que le projet original donnait à la confédération l’obligation de promouvoir les voies cyclables, la votation lui donne uniquement la possibilité de le faire, en respectant l’impulsion des cantons quant à la mise en place d’un réseau sur leur territoire.
La participation citoyenne est dans la moyenne des votations fédérales (37% contre ~40% ces dernières années), le ‘’oui’’ est présent dans toute la confédération, entre 57% et 86 % selon les cantons. La population est majoritairement pour les voies cyclables.
Les conséquences en résumé
Les voies cyclables sont maintenant considérées au même titre que les sentiers pédestres. Si la confédération supprime un aménagement cyclable, elle doit le remplacer.
La confédération a la possibilité de coordonner les réseaux cyclables. Elle “élaborera des données et des statistiques pour l’ensemble de la Suisse, développer des standards de qualité et de sécurité et fournir des géodonnées pour les cartes et les applications mobiles”. La création ou non d’une infrastructure cyclable reste à la charge des cantons.
En effet, la responsabilité des infrastructures routières dépend en premier lieu du cantonal, sauf pour les routes nationales. Il serait malvenu pour la confédération de faire de l’ingérence locale.
Peu de contraintes mais symbolique et rationalité au rendez vous
Comme le décrit bien Isabelle et le Vélo, les transports en communs (trains et bus) sont saturés — victimes de leurs performances — mais aussi, 80% des trajets en bus et 50% des trajets en voiture font moins de 5 km. La sécurité routière et la décongestion des autres modes de transports (publics et individuels confondus) sont les principaux arguments du fédéral. Le nombre d’accidents impliquant des cyclistes a augmenté ces dernières années alors qu’on observe une baisse pour les autres modes.
Pour améliorer leur mobilité et leur qualité de vie, les suisses font preuve de pragmatisme et choisissent d’exploiter le potentiel du vélo. Tous les bords politiques confondus et même un lobby pro-voiture (le Touring Club Suisse) ont réalisé des déclarations en faveur de la promotion des voies cyclables. Même si cet arrêté fédéral est peu contraignant, la volonté de promouvoir le vélo comme mode de déplacement prioritaire est bien présente.
Approche exportable en France ?
Le système démocratique suisse est très intéressant sur l’aspect mobilisation citoyenne. 100 000 signatures sont nécessaires pour déposer une initiative. Si on ramène ce chiffre à la population française (~ 67 millions versus ~ 8 millions pour la Suisse), il faudrait à l’initiative Parlons Vélo, un peu moins d’un million de voix pour obtenir le dépôt d’un texte. En France, le contexte citoyen est plutôt favorable au vélo avec 83 % des français souhaitant le retour du vélo en ville (IFOP), l’objectif serait donc réalisable (si on suivait les mêmes règles).
Dans l’immédiat, les 113 000 réponses au Baromètre des villes cyclables et les autres initiatives Parlons Vélo ont permis au plan vélo de voir le jour. Mais pour que le “système vélo” fonctionne, il ne faut pas nécessairement beaucoup de moyens mais une mise en place coordonnée et attentive pour une efficacité maximale. Le diable est dans les détails, et il faudra donc se mobiliser pour obtenir des textes au plus proche de nos attentes.