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Julie Pillot, administratrice de la <span class="caps">FUB</span> : « Faire du vélo une évidence »

©Julie Pil­lot

Qu’est-ce-qui t’a poussé à t’impliquer dans l’action associative pour le vélo ?

J’ai com­mencé à militer pour le vélo car je suis con­va­in­cue que c’est un mode de déplace­ment très béné­fique pour la ville et trop peu encour­agé par les pou­voirs publics (surtout lorsque l’on com­pare les mon­tants financiers engagés entre la voirie ou les trans­ports en com­mun avec ceux pour le vélo). J’ai rejoint l’association Vélo-Cité, à Bor­deaux, où j’habitais. J’ai ensuite rejoint Paris en Selle lorsque j’ai démé­nagé. Aujourd’hui, la prise de con­science se fait dans les villes mais se pose l’énorme défi des zones moins dens­es (péri­ur­bain et zones rurales) où se déplac­er à vélo est très loin du pos­si­ble dans les esprits, et donc, il est d’autant plus dif­fi­cile d’obtenir des finance­ments pour des amé­nage­ments dédiés au vélo auprès de col­lec­tiv­ités avec des bud­gets con­traints.

Quel est ton rôle à la FUB ?

Je m’occupe de pro­pos­er des out­ils et des ani­ma­tions au réseau, comme le guide pour mon­ter son asso­ci­a­tion pro-vélo et les ren­con­tres Par­lons vélo qui auront lieu en mai à Reims, et plus glob­ale­ment de ren­forcer le lien entre la FUB et ses mem­bres, avec un tra­vail en cours sur l’observatoire. Je par­ticipe aus­si à l’organisation des journées d’études et à la plate­forme munic­i­pales 2020. Je col­la­bore ponctuelle­ment à d’autres pro­jets, de recherche ou de lob­by­ing.

Quel est ton parcours professionnel ?

Je suis ingénieur ter­ri­to­r­i­al et je tra­vaille à l’amélioration des ser­vices d’eau et d’assainissement, hier en région parisi­enne, aujourd’hui dans la Drôme. A ce titre, je con­nais bien le fonc­tion­nement des col­lec­tiv­ités et les dif­férentes strates du mille-feuille ter­ri­to­r­i­al. C’est utile pour bien com­pren­dre quels acteurs sol­liciter pour faire avancer la solu­tion vélo !

Quels sont tes talents et compétences que tu mets au service de la FUB/Paris en Selle ?

Mes con­nais­sances des col­lec­tiv­ités, des marchés publics et des travaux de voirie sont utiles pour une bonne com­préhen­sion des enjeux qui découlent des poli­tiques de mobil­ités. Je tra­vaille depuis peu directe­ment avec des élus, ce qui sera utile, j’en suis sûre. J’essaie de met­tre à prof­it mon habi­tude de tra­vailler avec des instances pour faciliter le fonc­tion­nement entre le CA et les salariés.

Avoir été admin­is­tra­trice de deux asso­ci­a­tions mem­bres de la FUB très dif­férentes est une moti­va­tion pour tra­vailler à l’animation du réseau.

Je mets égale­ment à prof­it une expéri­ence pro­fes­sion­nelle en recherche pour col­la­bor­er sur les pro­jets de la com­mis­sion Etudes et recherche de la FUB.

Quelles sont tes impressions de la FUB vue de l’intérieur ?

J’ai pu vivre au CA l’émergence du plan vélo nation­al et l’énorme tra­vail de lob­by­ing fait pour la Loi d’Orientation des Mobil­ités (LOM), qui doit se pour­suiv­re dans sa mise en œuvre. A mon sens, les défis sont nom­breux, les envies mul­ti­ples, cer­taines ques­tions ne peu­vent pas atten­dre (comme le « savoir rouler », le mar­quage des vélos, les décrets d’application de la LOM actuelle­ment), et la FUB a besoin d’augmenter ses ressources bénév­oles, afin de libér­er du temps et de l’énergie aux admin­is­tra­teurs pour tra­vailler sere­ine­ment avec l’équipe salariée en crois­sance.

Il me sem­ble que dans son rôle de fédéra­tion et de représen­ta­tion, la FUB doit veiller à ne pas nég­liger ses mem­bres dans sa stratégie et dans la con­struc­tion de ses pris­es de posi­tion (embar­que­ment des vélos dans les trains par exem­ple) et cela néces­site un tra­vail de fond qu’il est par­fois dif­fi­cile de faire dans le tour­bil­lon des actu­al­ités et des urgences.

J’espère que les chantiers de réno­va­tion des out­ils d’échanges au sein du réseau et l’audit sur les out­ils de com­mu­ni­ca­tion qui sont en cours per­me­t­tront de dévelop­per une com­mu­nauté des bénév­oles FUB, mal­gré l’éloignement géo­graphique, pour que les mil­i­tants se sen­tent plus proches de son action et en capac­ité de par­ticiper.

Comment vois-tu le vélo en France dans 20 ans ?

Dans 20 ans, je suis con­va­in­cue que le vélo aura pris une vraie place dans les villes et sera pra­tiqué en sécu­rité tant par des enfants que par des per­son­nes avec des capac­ités physiques réduites. Il se sera adap­té aux dif­férents usages (VAE, car­go, tri­por­teurs, tri­cy­cles…). Se déplac­er à vélo ne sera plus ressen­ti comme dan­gereux, les autres usagers seront habitués aux cyclistes, grâce à des amé­nage­ments de qual­ité et fonc­tion­nels.

Le vélo sera plus générale­ment un mail­lon recon­nu et impor­tant de la chaîne de déplace­ments et de l’intermodalité. Il sera pos­si­ble de trans­porter son vélo dans les cars et les trains ou de le laiss­er en sécu­rité aux gares et arrêts de bus. Les itinéraires cyclables seront bien iden­ti­fiés pour reli­er des bassins de vie, per­me­t­tant de cir­culer en sécu­rité dans les zones peu dens­es.

As-tu une expérience du vélo à l’étranger ?

Dans les Pouilles en Ital­ie, j’ai vu peu d’aménagements, il était dif­fi­cile de trans­porter les vélos dans les trains, mais il y avait peu de monde sur les routes et c’était très agréable.

J’ai eu la chance de faire du vélo au Dane­mark, en Alle­magne ou encore aux Pays-Bas, où les itinéraires sont jalon­nés. Il est facile de pren­dre le vélo dans les trains et les routes sont plutôt en bon état. Par con­tre, j’ai été sur­prise de voir le nom­bre de pistes sur trot­toirs en Alle­magne. Il faut l’esprit ger­manique pour que la cohab­i­ta­tion se passe bien.

J’ai noté qu’à Berlin, le mar­quage vélo était présent aux inter­sec­tions (ban­des, flèch­es) et absent sur les lignes droites, ce qui mon­tre qu’ils font l’essentiel pour assur­er la sécu­rité des cyclistes alors qu’en France, la ten­dance est de faire le mar­quage « facile » sur les sec­tions droites et plus rien dans les inter­sec­tions, quand ça se com­plique…

Si tu avais un message à faire passer aux associations du réseau FUB, quel serait-il ?

Par­lez de la FUB dans vos asso­ci­a­tions et venez nom­breux aux ren­con­tres Par­lons vélo à Reims, ouvertes à toutes et tous ! Lisez le guide FUB « Créer et ani­mer une  asso­ci­a­tion pro-vélo », même si vous exis­tez depuis longtemps. Vous y trou­verez cer­taine­ment de quoi nour­rir votre réflex­ion.

Et pour les per­son­nes qui se dépla­cent à vélo en France plus générale­ment ?

Con­tin­uez, mon­trez à votre famille, vos amis, vos col­lègues que c’est pos­si­ble, que ce n’est pas dan­gereux et à la portée de tous !

Si ce n’est pas fait, adhérez à l’association FUB locale. Cela lui per­me­t­tra d’augmenter sa légitim­ité auprès des acteurs locaux pour les encour­ager à traiter sérieuse­ment les déplace­ments à vélo.

Et si vous pou­vez, militez pour le vélo, car il faut se faire enten­dre pour chang­er rad­i­cale­ment les poli­tiques de mobil­ités et faire du vélo une évi­dence.

Un article à lire aussi dans Vélocité n°154 — janvier-février-mars 2020, une publication de la FUB.