Le congrès du Mans était celui de tous les espoirs, entre un plan vélo national en voie de confirmation dans la loi sur les mobilités, et une deuxième édition du Baromètre des villes cyclables à l’automne qui va précéder les élections municipales de 2020.
Jamais l’aboutissement de longues années de plaidoyer pro-vélo n’aura été aussi proche. On n’aura pas tout tout de suite, mais un processus irréversible s’est mis en marche dans le bon sens. C’est dans ce contexte positif que se sont déroulés exposés et débats de la journée d’études, comme de l’assemblée générale de la FUB le lendemain.
Les congressistes ont été accueillis par de nombreuses personnalités, parmi lesquelles le maire de la ville Stéphane Le Foll, dont certains se souviennent que lorsqu’il était ministre de l’Agriculture, il se rendait régulièrement à vélo à la gare pour prendre le train pour Paris. Mais les deux ministres annoncés — Elisabeth Borne pour les transports et François de Rugy pour l’écologie — avaient décliné l’invitation du fait de la réserve imposée en période électorale.
Le choix était large parmi les ateliers et tables rondes, pour que chacun puisse trouver matière à définir le bon mode d’emploi du plan vélo. C’est à Bordeaux, où aura lieu la prochaine journée d’études de la FUB en début d’année 2020, qu’on pourra en faire un premier bilan.
Alors que le quotidien Le Monde daté du jour de l’ouverture du congrès de la FUB titrait sur le retour de la bicyclette, Frédéric Héran, auteur du livre éponyme, ne s’est pas fait prier pour développer à la tribune de la journée d’études du 10 mai 2019 quelques-uns de ses thèmes favoris, à commencer par celui de système. S’il a fallu un siècle pour assurer l’efficacité d’un système automobile, on espère qu’il en faudra un peu moins pour réussir l’approche systémique du vélo, qui ne suppose donc pas seulement un réseau, mais un ensemble de services, l’apprentissage, le savoir et l’expérience qui permet de réparer seul, et d’arriver à cette autonomie que beaucoup appellent vélonomie.
La voiture : un danger
Mais le système vélo n’est pas isolé : « l’ensemble des modes de déplacement fait système ». Et c’est là qu’il faut savoir rendre efficace le système vélo à l’intérieur du système des déplacements : « Il y a de la concurrence. La plus forte, c’est celle de la voiture, qui est un danger pour le vélo à cause de la masse et de la vitesse des véhicules. » Donc ne pas hésiter à le dire et à le redire : « Il faut baisser la vitesse et réduire le trafic automobile. » Faute de quoi c’est l’inverse qui risque de se produire : « Si vous voulez fluidifier le trafic auto, ça se fera forcément au détriment d’autres modes. » Donc du vélo.
Commencer par le maillon le plus faible, voilà qui est en train d’entrer dans les têtes chez les élus et fonctionnaires en charge des politiques de déplacements. Entre autres leviers : « remettre les collégiens au vélo », dit-il, ce qui conforte la FUB dans ses orientations, car elle a fait du « savoir rouler » l’un de ses mots d’ordre favoris.
Le vélo pris dans les cercles vertueux
Les choses avancent et nous sommes sortis de l’époque qui ignorait le vélo. Les vents sont porteurs et on peut aujourd’hui compter sur des cercles vertueux qui nous permettent d’être optimistes. « D’abord il y a un effet de parc. Plus il y a de vélos, plus l’offre peut être étoffée. On voit apparaître toutes sortes de matériels, qui eux-mêmes attirent de nouveaux cyclistes. Deuxième cercle : l’effet de club. Ici, on est dans le club FUB, qui est dans une dynamique extraordinaire : plus il y a de cyclistes et plus ça attire d’autres cyclistes. Troisième cercle vertueux : le réseau ! Plus il est homogène, plus il attire les cyclistes, et donc plus il faut étoffer le réseau. Dernier cercle vertueux : l’effet de sécurité par le nombre. Plus il y a de cyclistes et plus ils sont en sécurité parce qu’ils sont plus visibles, et aussi parce qu’il y a des automobilistes qui se mettent au vélo. » Et tous ces cercles vertueux se confortent les uns les autres.
L’importance d’évaluer ce qu’on fait
Ça ne va pas pour autant se faire tout seul. Les résistances sont encore nombreuses. D’où l’importance d’évaluer en permanence les progrès comme les reculs. « Nous n’évaluons pas assez ce que nous faisons, pourquoi ça n’a pas marché, estime Frédéric Héran. Il faut que dans la loi, il y ait une obligation d’évaluation. » Avec toujours en tête cette ligne rouge à ne pas franchir : « les nuisances de la voiture en ville, on n’a pas encore compris combien c’est un problème. »
« Imaginez un instant des rues sans stationnement automobile : qu’est-ce qu’on ferait de tous ces espaces gagnés ? Ca serait formidable, non ? ».