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Plan vélo : une avancée incontestable qui doit marquer le début d’une politique sérieuse

Trois chiffres qui peu­vent tout chang­er
• Pass­er d’une part modale vélo de 3 % à 9 % d’ici 2024
• Un fonds de 350 M € sur sept ans pour aider les col­lec­tiv­ités à assur­er les con­ti­nu­ités cyclables sur les points dif­fi­ciles
• Un pla­fond annuel de 400 € en fran­chise d’impôt et de coti­sa­tions sociales pour l’IKV, qui devient une indem­nité for­faitaire mobil­ité durable

Les mesures annoncées fixent un cap important

Le plan vélo com­prend qua­tre axes : la sécu­rité et la résorp­tion de coupures urbaines, la lutte con­tre le vol, les inci­ta­tions finan­cières, et le développe­ment d’une cul­ture vélo. L’Etat se donne ain­si pour la pre­mière fois les moyens de vis­er un cap : le triple­ment de la part modale du vélo d’ici 2024, afin d’atteindre 9 % des déplace­ments.

Il s’agit d’une mobil­i­sa­tion sans précé­dent du Gou­verne­ment qui témoigne de sa volon­té de posi­tion­ner le vélo comme mode de trans­port priv­ilégié. De nom­breux min­istères sont impliqués directe­ment dans sa réal­i­sa­tion : min­istère de l’Intérieur, min­istère de la Tran­si­tion écologique et sol­idaire (dont le min­istère des Trans­ports), min­istère de la Cohé­sion des ter­ri­toires, min­istère des Sol­i­dar­ités et de la San­té, min­istère du Tra­vail, min­istère de l’Education nationale, min­istère de l’Action et des Comptes publics, min­istère de l’Economie et des Finances, min­istère des Sports…

Si le mon­tant du fonds vélo est très inférieur à la propo­si­tion de la FUB, il faut not­er que c’est la pre­mière fois qu’un plan vélo finance sérieuse­ment les amé­nage­ments cyclables.

Sécurité : continuités cyclables et autres améliorations

L’Etat souhaite met­tre l’accent sur la sécuri­sa­tion des itinéraires cyclables et le ren­force­ment des mesures de sécu­rité routière en faveur des cyclistes, notam­ment grâce à la créa­tion d’un fonds nation­al « mobil­ités actives » d’un mon­tant de 350 mil­lions d’euros sur sept ans afin de soutenir les pro­jets de créa­tion de réseaux de pistes cyclables, en par­ti­c­uli­er en ciblant les dis­con­ti­nu­ités d’itinéraires. A ce titre, est lancé dès aujourd’hui un appel à pro­jets de l’ADEME (voir encadré) pour aider les col­lec­tiv­ités de taille moyenne à sol­liciter le fonds nation­al « mobil­ités actives » dès 2019.

De plus, la dota­tion de sou­tien à l’investissement local (DSIL) pour­ra être util­isée par les col­lec­tiv­ités dans le cadre de la trans­for­ma­tion des ter­ri­toires : 500 M d’euros sont réservés sur le quin­quen­nat pour les enjeux de mobil­ité.

Enfin, en assou­plis­sant la déf­i­ni­tion de la « voie verte » afin de faciliter la cohab­i­ta­tion des usages avec les véhicules d’exploitation des ges­tion­naires du domaine pub­lic (VNF, ONF), de nou­velles voies vertes pour­ront être créées et le mail­lage du ter­ri­toire sera amélioré.

Les dix dernières années ont par ailleurs déjà été mar­quées par des évo­lu­tions du Code de la route en faveur des mobil­ités actives. Le plan vélo pour­suit cette dynamique avec des nou­velles mesures annon­cées :

Cer­taines reven­di­ca­tions de la FUB, comme l’autorisation de con­sid­ér­er un pan­neau stop comme un « cédez le pas­sage », n’ont pas été retenues à ce stade.

Sûreté : Mieux lutter contre le vol

La peur du vol de vélos est un des freins prin­ci­paux à l’usage du vélo comme mode de déplace­ment quo­ti­di­en ; en effet, chaque année, plus de 300 000 ménages sont vic­times d’un vol de vélo.

En ce sens, le plan vélo prévoit la mise en place d’un plan glob­al de lutte con­tre le vol et le recel de vélos grâce notam­ment à la général­i­sa­tion du mar­quage des vélos neufs (12 mois après la pro­mul­ga­tion de la loi), et par la suite des vélos d’occasion ven­dus par des pro­fes­sion­nels (24 mois après la pro­mul­ga­tion de la loi). Ce dis­posi­tif sera ensuite porté au niveau européen. Ce plan per­me­t­tra de don­ner accès à tous les per­son­nels de police et de gen­darmerie aux fichiers d’enregistrement des vélos, à des fins de resti­tu­tion après un vol.

La loi d’orientation des mobil­ités pro­posera de fix­er des objec­tifs à attein­dre d’ici 2024 en matière de sta­tion­nement vélo sécurisé dans les gares ©JMT

La peur du vol de vélo néces­site égale­ment des actions préven­tives, grâce à des infra­struc­tures sécurisées dédiées au sta­tion­nement, notam­ment aux abor­ds des gares et des pôles d’échanges. Ain­si, la future loi d’orientation des mobil­ités pro­posera de fix­er à la SNCF des objec­tifs à attein­dre d’ici 2024 en matière de sta­tion­nement sécurisé.

Par ailleurs, l’obligation d’aménagement d’infrastructures pour le sta­tion­nement vélo sera pre­scrite égale­ment lors de travaux sur des bâti­ments exis­tants dis­posant de parc de sta­tion­nement auto­mo­bile.

Enfin, suite à la pre­mière expéri­ence menée par la FUB avec son pro­gramme ALVEOLE, il sera pos­si­ble de mobilis­er des Cer­ti­fi­cats d’Economie d’Energie (CEE) via des pro­grammes per­me­t­tant de soutenir la mise en place de sta­tion­nements sécurisés dans les étab­lisse­ments sco­laires, uni­ver­si­taires, à prox­im­ité des gares fer­rovi­aires et routières, etc..

Des incitations financières à l’usage du vélo au quotidien

L’indemnité kilo­métrique vélo, créée en 2015 dans la loi de tran­si­tion énergé­tique pour la crois­sance verte (LTE), n’a pas ren­con­tré le suc­cès escomp­té, puisqu’elle est restée fac­ul­ta­tive, et que peu d’employeurs ont décidé de la met­tre en place.

A cet égard, le plan vélo prévoit la créa­tion d’un for­fait mobil­ité durable acces­si­ble à tous les salariés, fonc­tion­naires com­pris, sur une base for­faitaire de 400 €/an en fran­chise d’impôt et de coti­sa­tions sociales (200 Ä/an pour les agents de l’Etat, mis en place à par­tir de 2020). Si elle reste fac­ul­ta­tive pour l’employeur, l’Etat s’engage à tra­vailler avec les parte­naires soci­aux afin de per­me­t­tre sa général­i­sa­tion.

Par ailleurs, le vélo est intro­duit dans le barème fis­cal, ce qui met enfin fin à une iné­gal­ité entre les modes de trans­port et sim­pli­fie le rem­bourse­ment des déplace­ments pro­fes­sion­nels effec­tués avec un vélo per­son­nel.

Enfin, l’Etat s’engage à soutenir l’achat de vélos à assis­tance élec­trique via un dis­posi­tif de Cer­ti­fi­cats d’Economie d’Energie, et encour­age la mise à dis­po­si­tion de flottes de vélos par les entre­pris­es (la loca­tion d’une flotte de vélos donne lieu à une réduc­tion fis­cale, au même titre que l’achat d’une flotte de vélos).

Développement d’une culture vélo

La FUB en avait fait une de ses trois pri­or­ités : plutôt que d’attendre que le change­ment socié­tal arrive, il faut le provo­quer, en touchant tous les publics, notam­ment les plus jeunes.

Le plan vélo a notam­ment con­fir­mé un appren­tis­sage sys­té­ma­tisé de la mobil­ité à vélo avant l’entrée au col­lège pour 2022 ©Pho­to Cycling

Plusieurs actions seront mis­es en place dès le plus jeune âge, avec notam­ment un appren­tis­sage sys­té­ma­tisé de la mobil­ité à vélo avant l’entrée au col­lège et la général­i­sa­tion du « Savoir rouler » qui existe déjà dans cer­taines académies. Piloté par le min­istère des Sports, le développe­ment de cette mesure doit pleine­ment associ­er le min­istère de l’Education nationale pour que la général­i­sa­tion de la mesure, pos­i­tive­ment annon­cée pour 2022, soit effec­tive.

L’Etat sou­tien­dra par ailleurs la con­struc­tion et le déploiement de plans de mobil­ité sco­laire en 2019, afin de favoris­er l‘autonomie des élèves pour accéder à leurs lieux de sco­lar­i­sa­tion.

Le développe­ment de l’activité physique adap­tée, dont l’usage des mobil­ités actives, pour des prob­lèmes de san­té, sera égale­ment pour­suivi, dans l’optique de la mise en place d’une stratégie sport san­té. Si la plu­part des médecins encour­a­gent déjà l’usage de la marche et du vélo, il s’agit d’accompagner les patients à pass­er véri­ta­ble­ment à l’acte.

Enfin, l’inclusion de nou­velles mobil­ités sera facil­itée : la loi d’orientation des mobil­ités don­nera les out­ils néces­saires aux col­lec­tiv­ités pour encadr­er l’implantation de nou­veaux ser­vices sur les voiries publiques, tels que les vélos en free float­ing, qui posent de nom­breux prob­lèmes. La loi ren­dra aus­si acces­si­ble aux four­nisseurs de ser­vices d’information les don­nées décrivant les réseaux cyclables, les don­nées de disponi­bil­ité en temps réel des vélos en libre-ser­vice avec ou sans sta­tions d’attache, ain­si que les don­nées rel­a­tives aux ser­vices de loca­tion et les sta­tion­nements dans les gares et pôles d’échanges, afin de favoris­er un max­i­mum l’intermodalité.

Un article à lire aussi dans Vélocité147 — septembre-octobre 2018, une publication de la FUB.

 

Pour la FUB, le début d’une tran­si­tion cyclable

La FUB remer­cie les mil­i­tants de ses asso­ci­a­tions adhérentes, les élus locaux, les députés et ses parte­naires partout en France qui se sont mobil­isés forte­ment depuis plus d’un an pour obtenir un plan vélo « sincère et financé ». En trac­tant pen­dant le Baromètre (113 000 répons­es obtenues), en con­tribuant en ligne sur le site des Assis­es de la mobil­ité, en envoy­ant mas­sive­ment des cartes postales (100 000 cartes envoyées), le réseau FUB a démon­tré que le vélo était une préoc­cu­pa­tion citoyenne majeure.

L’annonce du plan vélo n’est pas une fin en soi, mais unique­ment le début d’une démarche nationale en vue de créer un « sys­tème vélo ». La FUB attend désor­mais de l’Etat qu’il impulse une dynamique asso­ciant les col­lec­tiv­ités locales, les employeurs, les entre­pris­es de la fil­ière vélo et la société civile. Son exem­plar­ité — sans laque­lle il ne serait pas crédi­ble — et son rôle d’animation seront des fac­teurs essen­tiels pour attein­dre les objec­tifs, qui sont ambitieux, mais ten­ables. Plus que jamais, la FUB s’engage à rester mobil­isée et gardera un oeil exigeant sur le con­tenu de la loi sur les mobil­ités et les détails de mise en œuvre. Elle incite les col­lec­tiv­ités à tra­vailler avec son réseau sur la réponse à l’appel à pro­jets « Vélo et ter­ri­toires » pour que la tran­si­tion cyclable devi­enne rapi­de­ment une réal­ité.

 

Une étape par­mi d’autres

Il y a eu des étapes avant le plan vélo – Assis­es de la mobil­ité, rap­port du COI, enquête « Par­lons vélo », envoi de cartes postales… — il y aura d’autres étapes après l’annonce du 14 sep­tem­bre.

Les dis­po­si­tions pro­posées par le Gou­verne­ment dans le plan vélo seront inclus­es dans la loi d’orientation des mobil­ités. Loi qui fera bien sûr l’objet de débats par­lemen­taires, amende­ments, navettes entre les deux assem­blées, puis arbi­trages. Sans oubli­er les inter­férences pos­si­bles avec la loi de finances 2019.

Et après la pro­mul­ga­tion de la loi, il fau­dra atten­dre les décrets d’application, par­fois longs à venir, et pou­vant réserv­er quelques sur­pris­es, bonnes ou mau­vais­es.

Au terme de ce long proces­sus, on ne retrou­vera donc pas for­cé­ment à l’identique les ter­mes du plan vélo tel que présen­té par le Pre­mier min­istre.